
Les résultats des élections législatives finlandaises du 17 avril 2011 sont historiques. C’est la première fois qu’un parti populiste de droite, les Vrais Finlandais en l’occurence, entre dans le trio de tête des partis politiques de Finlande les plus importants en nombre de voix et de sièges. Il a obtenu 19% des suffrages. Mise en perspective, cette nouvelle donne perturbe indéniablement l’équilibre politique Finlandais en vigueur depuis la fin de la Seconde guerre mondiale où les partis social-démocrate et conservateur alternaient régulièrement pour former des gouvernements de coalition par l’entremise d’un parti centriste pivot.
La presse relevait il y a peu que les Finlandais étaient sous l’impression que leur vote ne comptait guère puisqu’au final les gouvernements se ressemblaient ; sans doute faut-il y voir une des raisons à ce bouleversement. Mais comment gérer maintenant la nouvelle situation ? Rappelons que la Finlande ne connaît pas à l’instar de la Suède et de la France une politique de blocs pré-électoraux et que pour les gouvernements de coalition finlandais précédents, les, négociations post-électorales permettaient toujours de trouver la majorité ad hoc. Cette fois-ci les Vrais Finlandais bloquent le mécanisme de négociations. Eurosceptiques à l’extrême, ces derniers opposent un vote négatif de principe sur toute aide financière à des pays européens en difficulté. Et cette question occupe l’espace médiatique finlandais depuis quelques mois.
Monsieur Katainen, chef de file du parti du Rassemblement, vainqueur officiel des élections avec 20,3 % des voix et chargé de mener les négociations gouvernementales, a butté ainsi pendant presque deux mois sur l’impossibilité d’un compromis. L’accord mentionné entre les trois grands partis le 16 mai est tombé à l’eau à cause de l’opposition des Vrais Finlandais au paquet d’aide financière de 78 milliards d’euros de l’Union européenne au Portugal. Quant à l’essai de coalition dite « Arc-en-ciel » rassemblant les conservateurs, les sociaux-démocrates, les Verts, la Fédération de la Gauche (communiste, 8,1%), les Démocrates Chrétiens (4%) et le Parti libéral suédois (4,1%), elle a échoué au 1er juin en raison de l’opposition des sociaux-démocrates et des conservateurs sur la politique économique préconisée par les partis pour ramener la dette finlandaise à un niveau acceptable, les premiers voulant une série d’investissements stimulant la croissance économique et des hausses d’impôts et les seconds des coupes budgétaires et des baisses de la fiscalité.
Les estimations de départ étaient pourtant optimistes puisqu’elles laissaient envisager un accord entre les trois premières formations pour le 15 mai 2011. La troisième tentative de rapprochement entre à nouveau les conservateurs du parti de M. Katainen, les sociaux-démocrates et les populistes des Vrais Finlandais e échoué le 10 juin dernier, les Vrais Finlandais étant opposés à un accord sur un prêt européen à la Grèce. Ce n’est qu’au bout de la quatrième tentative, le 18 juin, et alors que les médias enterraient la tentative de formation du gouvernement Katainen, que celui-ci arrivait à un accord avec le maintenant dénommé « pack des six », c’est à dire la formation Arc-en-Ciel décrite plus haut. Il aura fallu deux mois pour former le gouvernement
La question qui se pose désormais est de savoir s’il est raisonnable ou même possible de faire cohabiter des ministres issus de franges aussi variées de la vie politique, allant de députés de l’extrême gauche à la droite libérale. Les sociaux-démocrates finlandais peuvent-ils participer à un gouvernement dont le chef se situe à l’opposé des fondamentaux de la gauche en matière d’imposition ? La réponse à cette question est peut-être que le système de coalition gouvernementale post-électorale à la finlandaise s’essouffle et qu’il faudra trouver des solutions plus performantes pour la formation des gouvernements finlandais. Il est clair que faute d’un parti du Centre fort dans le trio des partis les plus importants, où à défaut d’un leadership clair d’un parti sur les autres, cette tradition est sérieusement mise à mal. La Finlande ne peut se permettre de s’offrir deux mois de vacances de pouvoir à chaque élection législative.